Le premier enjeu décrit dans notre manifeste est la confrontation à une certaine logique de production de biens et de services qui semble enfermée dans une forme de course aux volumes et à l’accumulation.
C’est d’abord une croyance que nous œuvrons à dépasser. Celle qui affirme que pour se développer économiquement, les entreprises doivent vendre toujours plus de volumes (de produits comme de prestations).
Pour survivre dans cette lutte qu’est la concurrence, pour surmonter les rapports de force sur les marchés des biens et des services, les dirigeants sont d’une certaine manière contraints d’exercer une pression sur les prix, sur la qualité, doivent optimiser le travail et dans cet élan : ne pas pouvoir se soucier plus concrètement des impacts sociaux et environnementaux de leurs activités.
Comment faire évoluer nos modes d’organisation et de production pour échapper à cette mécanique économique insatiable ? Comment réinjecter du sens dans notre rapport à la consommation devant l’urgence environnementale et ses crises multiples qui s’annoncent et s’installent déjà avec fracas ? La décroissance ou l’aveuglement ?
Le prisme de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération (EFC) est une focale qui permet de zoomer et dézoomer sur les modèles économiques qui conditionnent nos rapports aux enjeux sociétaux, entre autres notre rapport aux ressources matérielles. D’autres perspectives de développement plus souhaitables et plus soutenables sont atteignables à cette échelle.
De par cette prise de hauteur, nous soulignons que les bonnes pratiques RSE*, l’écoconception, le recyclage et autres engagements de principes et de valeurs : semblent manquer, de notre point de vue, de cette focale et donc d’impacts.
Ces initiatives, aussi nobles sont-elles, semblent incomplètes dans la mesure où nous pouvons parfaitement produire et vendre des produits recyclés qui n’ont aucuns intérêts essentiels à des usages particuliers. Les entreprises qui écoconçoivent leurs produits ont tout de même toujours pour objectif financier de vendre un maximum de volumes de ces produits écoconçus. Ceci, sans penser les questions de surconsommation, de pertinence, ni instruire les enjeux d’organisation de nos structures dont dépendent les perspectives d’une société plus soutenable.
Une profonde transformation de notre économie, de notre travail, de nos modes de consommation et de production, n’est accessible qu’à condition de poser les bonnes questions, bien avant de pouvoir prétendre envisager de bonnes réponses.
En abordant la question de la transformation de nos modèles économiques comme véritable enjeu conditionnant tout le reste, une hypothèse fut mise à l’épreuve du réel de diverses entreprises.
Par un travail de recherche, d’intervention* et d’expérimentation, le prisme de l’EFC a pu faire la preuve qu’il est possible de découpler la relation entre hausse du chiffre d’affaires et hausse des consommations de matières premières.
Ce nouveau modèle économique permet de faire reposer la rentabilité de l’entreprise sur des ressources immatérielles (ses compétences, la pertinence des relations de service, etc.) au détriment de l’usage toujours plus fort de ressources matérielles : nécessaire bifurcation dans un monde aux ressources premières en tension.
C’est en cela qu’est rendu possible un effet ciseau, véritable perspective d’un développement profondément durable, qui réussit à faire converger nos intérêts financiers aux enjeux sociaux et aux préoccupations environnementales.
Les deux courbes qui composent ce visuel mnémotechnique de notre projet se croisent, d’où cette représentation schématique formant une paire de ciseaux.
La Courbe rouge décroissante correspond à la diminution de la consommation de matière première.
La Courbe verte croissante correspond à la valorisation économique des ressources dites immatérielles.